L’amitié est sans aucun doute l’une des valeurs fondamentales de notre famille, et il faut admettre que les amis sont particulièrement utiles quand vient le temps de fêter son anniversaire. Azur étant M. Futur, dès la fin de sa fête des 8 ans, il a commencé à rédiger les invitations pour son 9ème anniversaire et a été quelque peu embêté lorsqu’il s’est rendu compte que nos plans de croisiere entraient en conflit avec son idée d’une grande fête avec ses copains de Bayswater. À partir de ce moment-là, il s’est focalise sur s’assurer qu’il aurait assez de temps aux Fidji pour se faire des amis avant sa fête d’anniversaire. Chaque jour, il demandait la date et calculait le nombre de jours restant jusqu’à son anniversaire, élaborant une stratégie pour maximiser les chances de nouer de nouvelles amitiés utiles. Au début, nous naviguions aux côtés de Tia, qui a son âge et qui est dans sa classe de Te Kura cette année, puis nous avons rencontré d’autres enfants sur Wild Things III et Offshore Haven, et les choses semblaient prometteuses. Mais nos itinéraires ont divergés et, le premier juin, nous nous sommes retrouvés seuls, dans la baie des îles, à Vanua Balavu. Un mouillage sublime mais isolé pour célébrer un anniversaire, sans amis à l’horizon a part des poissons colorés, des crabes qui marchent de travers, et des tortues farouches.

Loin de se décourager, Azur était toujours en train de finaliser ses invitations sur Paint 3D, insistant pour que ses amis apportent des maillots de bain et se demandant à haute voix quel genre de cadeaux il recevrait. J’ai eu la désagréable tâche de le forcer à se rendre à l’évidence : il n’y avait pas d’amis dans le coin et même s’il y en avait, ils n’avaient pas été prévenus suffisamment à l’avance et il n’y avait pas de magasin où acheter des cadeaux à la dernière minute. Heureusement, Azur est non seulement très tourné vers l’avenir mais aussi extrêmement résistant, avec une capacité rare à changer d’humeur en un clin d’œil, et il a donc immédiatement revu ses attentes à la baisse et demandé quelque chose de plus raisonnable : une journée où il choisirait le menu et le programme (comme je l’avais fait pour la mienne) et, comme cadeau, un bol sculpté dans une noix de coco. En faisant le bilan de la journée qui venait de s’écouler, avec des séances de plongée, de masque et tuba, et de kayak extraordinaires, des crêpes le matin, du poisson facon Butter Chicken et du gâteau à la banane pour le dîner – quelques-uns des plats préférés d’Azur, et un film après le dîner, nous avons rétrospectivement déclaré que c’était sa fête d’anniversaire, sûrs que c’était le mieux que nous pouvions lui offrir compte tenu des circonstances. Nous étions loin de nous douter que nous ferions mieux trois jours plus tard.


Le 4 juin, nous étions ancrés à côté de l’île de Qilaqila lorsque nous avons aperçu au loin un monocoque bleu marine qui se dirigeait vers la passe. J’ai tout de suite pensé qu’avec un peu de chance, il s’agirait de nos nouveaux amis de Wild Things III, j’ai supposé qu’ils se dirigeraient vers le populaire Shoal Pass et j’ai décidé d’y retourner également, pour me rendre compte à l’arrivée que le monocoque bleu marine n’était pas Wild Things mais Atreju, un bateau que nous ne connaissions pas, mais que nous avions croisé à Savusavu, reconnaissant le vaa (vaka/waka) polynésien à bord. Il n’a pas fallu longtemps pour que Thomas aille saluer l’équipage et convaincre Azur de preparer un autre gâteau à la banane (entamant à peine notre stock de bananes) à partager avec eux pour le gouté. Il a accepté à contrecœur, arguant qu’ils ne pouvaient pas être considérés comme des amis puisqu’ils n’tétaient que des inconnus quelques minutes plus tôt. C’est ainsi que nous avons mangé son “vrai” gâteau d’anniversaire à bord de Atreju, en compagnie, en guise d’amis, d’une sirène espiègle de six ans, d’un couple d’adolescents et de trois voyageurs Danois adultes et très sympathiques qui nous ont rassurés sur nos chances de rencontrer des tortues, d’après leur expérience, reprenant la seconde moitié de leur circumnavigation après être restés bloqués en Polynésie pendant deux ans. Nous avons ensuite participé à une course acharnée de stand-up paddle board, de kayak et de vaa autour des îlots (les concurrents étaient les équipages d’Obelix, Atreju et de Domini), sous les encouragements des enfants. Et à la tombée de la nuit, nous sommes retournés à Obélix pour préparer le dîner, nous avons dansé sur “It’s my birthday”, nous avons regardé Thomas nous enchanter avec un spectacle de feu sur le pont, et nous avons terminé la journée avec une pizza, un film, de la glace au yaourt ratée et des mousses au chocolat.

Avec les neuf ans d’Azur, nous avons maintenant à nous tous cent ans ! J’avais rêvé, pour l’occasion, d’une grande réunion de famille et d’amis dans un endroit idyllique ici à Fidji, mais ces choses demandent de l’organisation, des pépettes et de la volonté des participants, et cela aurait été un projet de plus à coordonner, ce ppourquoi je n’avais pas de place dans mon cerveau. Considérons-nous déjà chanceux de profiter de ce voyage d’une vie, mais l’invitation reste ouverte, nous aimerions que nos proches nous rejoignent n’importe où le long du voyage et aient un aperçu de cette douce vie d’aventuriers du bout du monde !
