Improbable!

La magie entre Bugarach, une ancienne voisine et les connaissances encyclopédiques de Zéphyr

J’ai parfois l’impression d’être le protagoniste principal d’un remake du Truman Show, avec des producteurs à court de figurants et, faisant appel en dernier recours à d’anciens personnages secondaires en pensant que je ne le remarquerai pas. Mais j’ai l’oeil!

C’est ainsi que j’ai abordé une dame qui a attiré mon attention à la médiathèque de Carnon avec un hésitant “On se connait, non?”.

J’avais hésité un moment car, quelle que soit l’insistance avec laquelle je la suivais à travers les allées, absorbée par les livres qu’elle retirait des étagères, elle me tournait sans cesse le dos et je ne parvenais pas à apercevoir clairement son visage ou à faire en sorte qu’elle me remarque. Cependant, je pouvais sentir quelque chose, comme un lien ténu qui nous unissait. Sur le qui-vive après avoir entendu son fils lui parler anglais, je me demande si je l’aurais repérée autrement, mais j’étais là, persuadée de reconnaître son énergie, ou comme je l’appelle, sa signature énergétique, en dépit d’un accoutrement étrange avec des bottes en caoutchouc qui ne correspondait pas à l’idée que je me faisais du personnage. Je suis donc allée de l’avant, décidée à ne pas manquer une occasion de renforcer des liens humains, et j’ai abordé cette potentielle étrangère devant des bibliothécaires perplexes.

Elle m’a répondu avec malice, avec un accent d’Europe de l’Est presque imperceptible, et j’ai su alors que je ne me trompais pas, “Peut-être, ça dépend, d’où ?” et dès que j’ai mentionné la Nouvelle-Zélande, son visage s’est illuminé, et elle m’a alors située, son ancienne voisine de St Heliers, il y a dix ans, lorsque nos deux garçons, mon aîné et son cadet, étaient encore des bambins. D’origine croate, mariée à un Suédois, elle avait passé ces dix années à revenir lentement en Europe avec sa famille, passant quelques années à faire du bénévolat aux Tonga, au Vanuatu, à Mayotte, en Croatie, avant de se réinstaller à Montpellier. Cela m’a rappelé qu’elle occupait une place particulière dans ma mythologie en tant qu’incarnation de la spontanéité, tout comme mon amie de longue date Elise, qui m’a récemment confié que la spontanéité, elle ne pouvait plus faire autrement. Nous avons bavardé avec Nada et pris le thé à la maison. Les coïncidences ne se sont pas arrêtées là puisque peu de temps auparavant, elle avait séjourné sur un bateau transformé en Air B&B à Barcares, avait regardé un film d’Obélix la veille, et sa fille de 19 ans étudiait maintenant à Paris, au lycée où Thomas et moi nous sommes rencontrés. Inutile de dire que nous avons prévu de nous revoir bientôt pour honorer l’alignement des étoiles et la série d’événements heureux qui ont déclenché cette rencontre, que le hasard seul peut difficilement expliquer.

Une coïncidence qui vient s’ajouter à celle que j’ai failli manquer il y a deux semaines, lorsque pendant toute une soirée nous avons batifolé sur la délicieuse musique de King Selewa & friends (un quartet de reggae caribéen coloré avec contrebasse, clarinette/saxe, guitariste et un chanteur charismatique), partagéeant sans le savoir la piste de danse avec la maman de ma professeur de tango. Bien sûr, je nourrissais quelques suspicions en apercevant cette grande dame mince à la peau basanée danser, mais les informations dont je disposais alors étaient contradictoires et insuffisantes pour être certaine de son identité, qui ne m’a été confirmée que le lundi suivant, lors de notre cours de tango, en racontant à Erna que nous avions passé le week-end à Bugarach, une nouvelle accueillie qu’elle a accueilli avec incrédulité car ses grands-parents et d’autres membres de sa famille vivent en effet toujours là-bas, ce qui expliquait la présence de sa maman à la Fête de la Châtaigne.

Et comme jamais deux sans trois, il faut que je vous raconte ma conversation improbable avec le très avenant et bavard guichetier de Montpellier Danse rencontré il y a quelques jours. Après une longue discussion sur les couleurs utilisées dans son logiciel d’aménagement de salle de spectacle, il était en train de saisir mes coordonnées pour éditer nos cartes d’abonnement ainsi que des billets pour le spectacle “Zéphyr” de Mourad Merzouki en février prochain (que nous ne pouvions évidemment pas manquer) lorsqu’il m’a indiscrètement demandé si j’avais visité l’Opéra Comédie lors des Journées du Patrimoine. J’ai été interloquée qu’il connaisse ce détail car bien que physionomiste, son visage ne me disait rien du tout. Et il a continué en expliquant qu’il avait un ami qui lui avait parlé d’un jeune garçon prénommé Zéphyr rencontré alors qu’il travaillait comme guide à l’Opéra ce week-end là. Apparemment, son ami avait été tellement impressionné par les connaissances approfondies de mon fils en matière de mythologie gréco-romaine et par la pertinence de ses questions qu’il avait raconté l’anecdote à plusieurs reprises. De plus, mon copain guichetier devait voir son ami le soir-même pour jouer de la musique avec lui. Je parie que je n’ai pas été la seule depuis à raconter cette histoire réjouissante à qui voulait bien l’entendre.

Mais franchement, quelles étaient les probabilités de rencontrer autant d’êtres humains connectés dans un endroit encore relativement nouveau et dans un laps de temps aussi court ?

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