Scrutant l’horizon au lever du soleil, à moitié réveillée après que Thomas ait annoncé notre arrivée imminente à Larnaca, à Chypre, mon système œil-cerveau s’efforce d’intégrer la vue qui consiste en des rangées d’immeubles de plusieurs étages s’étalant le long de la baie sur des kilomètres, semblant me crier : “Bienvenue dans la civilisation !” Un choc béton après des mois de paysages naturels à peine entaillés par des éléments construits par l’homme. Je ne savais pas à quoi m’attendre de la Chypre du Sud, mais je devais avoir imaginé l’île méditerranéenne de façon romantique et, à ce moment précis, je ne suis pas impressionnée.
En outre, l’air est encore assez froid, ce qui n’aide pas à me faire avaler la pilule.
Nous avons choisi Larnaca pour atterrir, en partie sur les conseils de notre ami Pascal de Brulevent, parce que c’est l’un des ports les plus proches après la sortie du canal de Suez, mais aussi pour son climat doux, son histoire et ses sites intéressants, son aéroport international tout proche et sa marina à prix raisonnable, ce qui en faisait une escale pratique pour accueillir maman pour une semaine de vacances.

Après quelques péripéties de dernière minute à Suez où notre transit aurait été retardé sans l’intervention du capitaine Mohammed Mohsen, responsable du transit des yachts de SCA, nous arrivons quelques jours avant elle, accueillis une fois de plus par Pascal et Marie-Laure avec qui nous déjeunons et dînons le jour même après avoir fait le check-in.
Je fais également quelques courses de base grâce à notre nouvelle voisine russe de l’embarcadère, Anna, qui m’emmène en voiture à l’épicerie et au supermarché, tandis que Zéphyr fait le lit de Mamie Zoé avec le désormais traditionnel cygne en serviette de toilette qui l’attend.
Après presque cinq ans de séparation, je ne peux contenir des larmes de joie lorsque je vois maman émerger du terminal à 2 heures du matin, avec ses valises prune parfaitement coordonnées et son gilet orange. Elle n’est là que pour une semaine et me rappelle rapidement qu’il n’y a pas de temps à perdre en effusions, alors nous partons, récupérons notre voiture de location et retournons au bateau où nous continuons à bavarder un moment avant de nous effondrer.
Le premier jour, nous nous remettons de notre nuit tardive, ouvrons nos cadeaux, nous promenons dans la vieille ville, prenons des photos devant les peintures murales, faisons du shopping, mangeons des gyros dans une taverne et commençons officiellement notre régime de glaces.
Le deuxième jour, nous répondons à la demande de maman de voir le rocher d’Aphrodite sur le chemin en allant visiter Paphos et ses mosaïques si bien conservées. Après un pique-nique sur le front de mer de Paphos tres achalandé, pénétrer dans le calme du site archéologique est très apaisant, jusqu’à ce qu’Azur, qui remarque toujours les détails cachés de la vie, remarque que l’une des mosaïques a une tête de sanglier ou d’âne coupée, et la retrouve rapidement ensanglantée dans la gueule de la panthère representée à côté.
Bien que certains locaux prétendent que Pâques sonne le début de l’été à Chypre et qu’il ne pleut plus jamais après, les nuages sombres qui se profilaient à l’horizon le matin n’étaient pas très inspirants, mais heureusement le pire de l’orage nous frappe lorsque nous sommes dans la voiture, avec de la grêle qui s’abat sans crier gare, formant des plaques de neige sur le bord de la route encore visibles le lendemain en conduisant jusqu’au Mont Olympe.
Ma mémoire me fait déjà défaut quant au déroulement exact de la suite, entre l’escalade du rocher d’Aphrodite, les ricochets, la plongée en apnée et les bains de soleil dans les magnifiques (mais sacrément trop organisées et bordées de touristiers, c’est-à-dire de parasols et chaise longue payants), la marche jusqu’à la grotte des cyclopes, la randonnée sur le sentier d’Artémis, l’atmosphère d’antan de Kakopetria, les fous-rire lors d’une partie de Tengo Duo, le défilé de fanfares de la fête du travail et un dernier dîner au jardin d’Ithaques, on pourrait dire que c’était à peine des vacances étant donné le nombre de kilomètres parcourus en si peu de temps (plus que je ne voudrais l’admettre à mes amis les plus soucieux de l’environnement) et la liste d’activités que nous avons faites. Néanmoins, nous étions très reconnaissants de laisser la navigation derrière nous pour un moment, surtout en découvrant à quel point le sud de l’île est pauvre en mouillages abrités, et d’explorer l’île par la terre.























